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Source : Images de la France (SIG)




II. La France et l’immigration

 

1. le phénomène de l'immigration

L'entrée pacifique d'étrangers susceptibles de séjourner longtemps sur le territoire d'un pays est un phénomène que les États sont amenés parfois à provoquer, parfois à interdire, toujours à réguler. Fonction des conditions économiques, politiques et démographiques des pays d'accueil comme des pays d'origine, l'immigration s'inscrit dans l'interdépendance des différentes régions du monde, qui affecte principalement, mais non exclusivement, les rapports des pays industrialisés avec ceux du tiers-monde.

Les flux migratoires

La mobilité des hommes n'est ni exceptionnelle ni nouvelle, mais elle s'est considérablement amplifiée au XIXe siècle. L'Europe est alors une terre d'émigration, principalement vers les États-Unis et les colonies; au XXe siècle, elle est devenue une terre d'immigration. Les flux migratoires concernent l'ensemble du monde et génèrent des problèmes sociaux et culturels. L'intégration des immigrés, même lorsqu'elle est souhaitée, est un processus lent marqué de crises d'autant plus aiguës qu'elle n'est pas soutenue, comme cela a été le cas pour les États-Unis au XIXe siècle, par un projet de société. Les immigrés restent souvent marginalisés, tandis que ceux qui regagnent leur pays sont déstabilisés. Les uns comme les autres ont à résoudre les tensions nées d'une confrontation avec une culture différente de la leur.

L'exode de travailleurs peut être une solution à la surpopulation d'un pays, surtout s'il connaît, de surcroît, une carence de ressources et des problèmes de sous-emploi. Le soutien qu'apporte l'émigré à sa famille contribue à l'augmentation de la consommation et à la vitalité de l'économie locale. Le retour de travailleurs ayant acquis une qualification peut être bénéfique au pays d'origine. Inversement, un pays dont la démographie stagne a besoin de main-d'œuvre. Les flux migratoires concernent aussi des spécialistes désireux de profiter des conditions offertes par des sociétés plus riches, ces dernières ayant intérêt à attirer des «cerveaux» (c'est le brain drain). Par ailleurs, les persécutions religieuses, politiques ou raciales ainsi que les guerres contraignent des populations à s'expatrier; la convention de Genève (1951) a défini pour elles le statut de réfugié.

La plupart des personnes qui quittent leur pays d'origine ont actuellement tendance à s'installer durablement dans les pays d'accueil, malgré les obstacles mis par certains de ces derniers au «regroupement familial». Les migrants choisissent généralement les destinations attractives – les principaux pôles d'immigration sont l'Amérique du Nord, l'Europe occidentale et les pays du golfe Persique –, les plus proches géographiquement ou historiquement (anciennes colonies, notamment). La majorité d'entre eux vient des pays du tiers-monde. En 1990, on estimait à près de 40 millions le nombre des personnes vivant officiellement dans un pays dont elles n'ont pas la nationalité.

Le «creuset français»

Les pays d'accueil règlent diversement les problèmes de logement, de scolarisation des enfants, d'intégration des immigrés, problèmes dont le «creuset français», selon l'expression de G. Noiriel, donne un exemple.

Du XIXe siècle à la Seconde Guerre mondiale

Au XIXe siècle, l'immigration est dite «de voisinage» parce que, à l'exception notable des travailleurs polonais, elle est le fait de ressortissants d'États voisins de la France venus spontanément s'installer dans des régions frontalières. À partir des années 1880, elle touche prioritairement des hommes jeunes, célibataires ou mariés sans enfants, salariés le plus souvent, et destinés à occuper des emplois délaissés par les Français. Le patronat commence à organiser un recrutement collectif à distance, à l'exemple de Wendel et de Schneider, qui font venir en Lorraine des trains entiers d'ouvriers italiens, et des houillères du Nord et du Pas-de-Calais, qui embauchent des mineurs polonais. L'immigration fait alors l'objet des premières mesures de contrôle et d'intervention étatiques, telles l'inscription dans les mairies rendue obligatoire en 1888 et l'instauration, par le décret du 2 avril 1917, d'une carte de séjour pour étrangers. Bien qu'absorbée de manière continue par un taux important de naturalisations, la part des étrangers au sein de la population globale ne cesse d'augmenter: de 381 000 en 1851, date de leur premier comptage, elle atteint 2 715 000 en 1931. À cette date, les plus nombreux sont les Italiens (800 000), les Polonais (500 000), les Espagnols (350 000) et les Belges (250 000), lesquels avaient été majoritaires au XIXe siècle. Ces communautés sont alors la cible de violentes menées xénophobes. Sous l'effet de la crise économique du début des années 1930 et des tensions racistes qui conduisent au vote de la loi du 10 août 1932 – qui pose le double principe d'une protection de la main-d'œuvre nationale et d'un contingentement de la main-d'œuvre étrangère dans chaque secteur économique –, cette progression spectaculaire fut enrayée jusqu'à la fin de la Seconde Guerre mondiale, qui contribua elle aussi au décroissement du nombre des immigrés (1 744 000 en 1946, soit 4,38 % de la population totale).

L'après-guerre et les Trente Glorieuses

L'immédiat après-guerre est marqué par une reprise de l'organisation, de plus en plus institutionnalisée, des flux migratoires. L'Office national d'immigration (ONI), qui deviendra l'Office des migrations internationales (OMI), est créé en 1945; la Société nationale de construction de logements pour les travailleurs (Sonacotra), fondée en 1956 – initialement pour les communautés algériennes –, est chargée, à partir de 1962, des constructions pour tous les travailleurs migrants; enfin, le Fonds d'action sociale (FAS), plusieurs fois réformé depuis 1958, intervient notamment dans les domaines du logement et de la formation. Ce mouvement d'institutionnalisation se poursuit en 1966 avec la création du cadre ministériel de la Direction de la population et des migrations (DPM) et, en 1984, et avec celle du Conseil national des populations immigrées (CNPI).

La progression du nombre des immigrés (1 765 000 en 1954; 2 170 000 en 1962; 2 621 000 en 1968) s'effectua de manière fort désordonnée sous la responsabilité d'un patronat qui, du fait de l'impéritie de l'ONI, géra pratiquement sans contrôle l'arrivée de migrants. Cette situation conduisit l'État à instituer par des circulaires contraignantes de nouveaux mécanismes de maîtrise, jusqu'à la décision de suspendre l'immigration en juillet 1974.

Marquée notamment par les bouleversements politiques et démographiques de la guerre d'Algérie (1954-1962), la période nommée, depuis Fourastié, «les Trente Glorieuses», qui s'achève avec la crise économique du début des années 1970, fut caractérisée par le rôle essentiel et souvent méconnu des immigrés dans le processus de modernisation de l'appareil productif français et par une modification profonde de la composition de la population immigrée, au sein de laquelle augmenta très nettement la part des travailleurs africains: leur proportion par rapport à l'ensemble des étrangers passa de 3,1 % en 1946 à 19,7 % en 1962, 24,8 % (dont 18,1 % d'Algériens) en 1968, puis à 45,8 % en 1990.

La main-d'œuvre immigrée, sans qualification, est parfaitement adaptée aux nouveaux emplois mécanisés, pour lesquels l'ignorance de la langue apparaît comme un facteur de productivité. Dans le système productif français à cette époque, l'interchangeabilité et la mobilité sont à la base du caractère rentable de l'emploi de travailleurs immigrés, recrutés au gré des fluctuations économiques, singulièrement dans le secteur de l'automobile et dans celui des travaux publics. Le faible coût de cette main-d'œuvre apparaît plus clairement encore s'il est rapporté non seulement au salaire direct, mais également à l'ensemble des coûts d'éducation, de formation et de cessation d'activité économisés pour des travailleurs appelés dans la force de l'âge et que des mécanismes souples permettaient de «renouveler» en cas de besoin.

 

2. Les formes d'immigration modernes

En dépit de l'arrêt officiel de l'immigration, la période qui suit est marquée dans un premier temps par la poursuite de l'augmentation du nombre des étrangers (3 442 415 au recensement de 1975 et 3 714 200 à celui de 1982), due à plusieurs causes: en premier lieu, la tendance à la hausse a résulté de l'importance de l'immigration familiale (environ 40 000 entrées annuelles au début des années 1980) et de l'octroi par la France du statut de réfugié politique à des ressortissants de certains États, tels ceux du Sud-Est asiatique et de la Turquie. La montée d'une immigration originaire d'Asie est l'une des caractéristiques nouvelles de l'immigration française, de même que la forte augmentation, entre 1975 et 1992, du nombre des ressortissants d'Afrique noire. En outre, l'interdiction d'entrée ne s'applique pas aux individus dont le métier et le niveau de qualification répondent à des besoins essentiels de l'économie française, ni aux ressortissants de la CEE, qui, conformément aux dispositions du traité de Rome (1957), jouissent du droit de libre circulation à l'intérieur de la Communauté. Les frontières demeurent par ailleurs ouvertes à l'immigration saisonnière, qui concerne environ 100 000 personnes. De plus, en 1981 et 1982, la situation d'environ 120 000 immigrés «clandestins» a été régularisée.

Progressivement, la lutte contre l'immigration clandestine par des mesures d'expulsion s'est accompagnée de dispositions visant à sanctionner les employeurs qui enfreignent la loi. Il est à noter enfin que le chiffre global de l'immigration officielle se serait stabilisé à partir de 1982 et aurait même régressé, malgré le succès mitigé des mesures d'aide au retour, puisqu'il était en 1999 de 4 310 000 personnes, c'est-à-dire 7,4 % de la population totale, une proportion constante depuis 1975.

Les données sociologiques

Le terme d'«immigration» est utilisé de manière extensive en sociologie et en économie pour désigner les conditions de l'organisation du travail migrant et les conditions d'existence des individus qui l'exercent ainsi que de leurs familles; il est en revanche absent du droit, qui ne connaît que la distinction des nationalités. Parce qu'ils sont nés en France, les jeunes «Beurs» ne sont pas des immigrés, et beaucoup d'entre eux ne sont pas non plus des étrangers.

Les secteurs d'activité

L'immigration française des années 1990 se caractérise par d'importantes transformations d'ordre économique et juridico-administratif. Principalement employés dans l'industrie, les immigrés actifs connaissent en effet une nouvelle répartition selon les emplois. Parce qu'il en subit en priorité les conséquences, l'emploi des salariés étrangers a joué un rôle d'amortisseur des effets produits sur l'économie nationale par les mutations industrielles. L'on constate une diminution de leurs effectifs proportionnellement plus importante que celle des Français dans certains secteurs tels que le bâtiment, le génie civil et l'agriculture. Dans le même temps, l'on observe une augmentation remarquable de l'emploi de la main-d'œuvre immigrée dans les branches du tertiaire, singulièrement dans le commerce et dans les services (nettoyage, entretien). La pénétration dans le tertiaire concerne en particulier les femmes et les nationalités «nouvelles».

 

3. Immigration et exclusion

Victime «prioritaire» de la réduction des emplois peu qualifiés dans l'industrie, la population immigrée a connu dans les années 1980 un taux de chômage qui s'est accru proportionnellement plus vite que celui des Français. Ce phénomène a suscité, pour la première fois dans l'histoire des immigrés, une résistance de masse (grèves des foyers Sonacotra entre 1975 et 1980, grèves menées au milieu du premier septennat de François Mitterrand) dans une conjoncture marquée par l'exacerbation du racisme et les premiers gains électoraux du Front national.

Les salaires moyens des immigrés sont d'environ 20 % inférieurs à ceux des Français, écart dû à une différence notable de qualification entre les deux populations d'actifs. Les travailleurs immigrés, soumis aux mêmes conditions que les travailleurs français, bénéficient des mêmes prestations. Globalement, les cotisations sont supérieures aux prestations pour les assurances maladie et vieillesse, la situation étant inverse pour les allocations familiales ainsi que pour les prestations de chômage et d'accidents du travail. Les ménages immigrés habitent plus souvent que les Français dans des logements anciens, peu confortables, plus petits et où ils sont plus nombreux. Ils sont également en proportion moindre propriétaires de leur logement. Les aspects les plus préoccupants concernent le surpeuplement des logements des familles et la situation de nombreux immigrés isolés, dont 140 000 vivent dans des foyers gérés par la Sonacotra.

Le problème politique

Depuis la loi du 17 juillet 1984, instituant le titre unique de séjour et de travail, le nouveau système distingue la carte de résident, valable dix ans et renouvelable de plein droit, permettant à son titulaire l'exercice de la profession de son choix sur tout le territoire, et la carte de séjour temporaire, valable un an et renouvelable deux fois, qui porte la mention «salarié» ainsi que les activités professionnelles et les zones géographiques autorisées. Ratifié en France par le référendum du 20 septembre 1992, le traité sur l'Union européenne, dit de Maastricht, reconnaît aux ressortissants de la Communauté européenne, sous certaines conditions et limitations, le droit de participer aux élections municipales.

Toutefois, les réglementations ne peuvent régir totalement les rapports sociaux; les relations entre groupes de culture et de langue différentes dépendent de facteurs multiples, tels que la représentation de l'autre, l'identité nationale, le respect des droits de l'Homme, etc. Entre les deux attitudes extrêmes – séparation imperméable ou assimilation totale –, un grand éventail de modes d'insertion pour les immigrés, d'acceptation pour les nationaux, est possible. À l'heure de l'économie-monde et du «village planétaire», la compréhension des stratégies interculturelles n'en est qu'à ses balbutiements.

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L'IMMIGRATION EN FRANCE

L'immigration n'est pas seulement un sujet sensible de l'actualité politique; c'est aussi l'occasion d'une interrogation sur le lien social, l'intégration nationale et la citoyenneté.

Les motifs de migration

La France est une terre traditionnelle d'immigration: depuis plus d'un siècle et demi, alors que les autres pays européens associent fécondité élevée et émigration, la France intègre des populations étrangères afin de prévenir son déclin démographique. Aujourd'hui encore, l'immigration est parfois présentée comme le remède au vieillissement de la population nationale.

Le pays des Droits de l'homme se veut également terre d'accueil pour les réfugiés politiques. Il a notamment accueilli, depuis le début du siècle, des Italiens, des Polonais, des Russes blancs, des Ukrainiens, des Arméniens, des républicains espagnols, des Chiliens, des Asiatiques, etc. En 1952, la France signe la convention de Genève de 1951 qui régit la pratique actuelle de l'asile. Elle crée l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA).

Dans un pays qui s'industrialise, les besoins de main-d'oeuvre ont suscité les deux grandes vagues d'arrivées du XX e siècle: dans les années vingt (1920 à 1930) pour la reconstruction du pays après la Première Guerre mondiale et dans les années soixante (1956 à 1973) pour les mêmes raisons. L'Office national d'immigration (ONI) est créé en 1946 pour organiser le recrutement des travailleurs étrangers requis par l'essor industriel.

Enfin, dernier motif principal de migration: le regroupement familial. Dans les premiers temps, les travailleurs immigrés ne sont pas censés s'installer en France; célibataires, ils sont affectés dans des foyers. Mais au fil des années, ils arrivent de plus en plus souvent accompagnés de leur famille - ou ils la font venir. D'autres formes de logement sont alors nécessaires. Certaines d'entre elles (les cités de transit) demeureront parfois insalubres.

En juillet 1974, devant le ralentissement de la croissance économique, le gouvernement annonce l'arrêt officiel de l'immigration, en dehors du droit d'asile et du regroupement familial. Désormais, celui-ci est la principale source d'immigration: il domine dans les statistiques de l'ONI devenu, en 1987, Office des migrations internationales (OMI).

Etrangers et immigrés: les chiffres

Avant toute chose, il faut distinguer les étrangers et les immigrés. Les premiers sont simplement les personnes qui n'ont pas la nationalité française. Les seconds sont les personnes qui, nées à l'étranger, vivent en France. Dès lors, un étranger peut ne pas être un immigré et, surtout, un immigré peut ne pas être un étranger s'il a acquis la nationalité française. C'est ainsi qu'aujourd'hui, plus d'un tiers des immigrés (36 %) est détenteur de la nationalité française.

Dans ces conditions, selon le Recensement général de la population de 1999, le nombre d'étrangers a connu une baisse de 9 % depuis 1990, pour deux raisons principales: les naturalisations (550 000 sur la période) et les décès (190 000). En mars 1999, 3 260 000 étrangers résidaient en France métropolitaine (soit 5,6 % de la population).

En revanche, le nombre d'immigrés stagne, puisque sa progression sur dix ans suit celle de la population totale (3,4 %): en mars 1999, 4 310 000 immigrés résidaient en France.

Les origines nationales des immigrés

L'immigration en France a d'abord été d'origine européenne: italienne, belge et polonaise jusqu'à la Seconde Guerre mondiale, puis espagnole et surtout portugaise après la guerre. Dans les années 50, l'immigration africaine - d'abord maghrébine, puis subsaharienne - s'est accrue, en chiffres absolus et relatifs. Enfin, plus récemment, on observe une diversification des pays d'origine, avec la montée de ressortissants d'Asie (surtout du Sud-Est: + 35 % entre les deux recensements), et, plus minoritaires, les Turcs (+ 16 %) et les immigrés d'Europe de l'Est. Mais la principale progression appartient à la population venue d'Afrique subsaharienne qui avait triplé entre 1982 et 1990 et a encore presque doublé (+ 43 %) ces dix dernières années.

De 1962 à 1975, les Italiens constituaient la première population immigrée (32 %), devant les Espagnols, les Polonais et les Algériens. Depuis 1975, les Portugais représentent la plus nombreuse communauté d'origine étrangère, devant les Algériens. Ils sont toutefois moins nombreux que les Nord-Africains ensemble (Algérie + Maroc + Tunisie).

Selon l'INSEE, entre 1990 et 1999, les origines géographiques des étrangers se sont diversifiées: les personnes d'origine européenne ne sont plus que 1 600 000, soit une baisse de 9,3 % par rapport à 1990. Cette diminution est continue depuis 25 ans: les ressortissants européens constituaient 57 % de la population étrangère en 1975, 49 % en 1990, 45 % en 1999.

Assez généralement, les flux migratoires concernent d'abord des travailleurs célibataires (immigration de main-d'oeuvre), puis des familles (immigration de peuplement). C'est pourquoi, dans un premier temps, la structure par âge des immigrés se distingue de celle de l'ensemble de la population: elle est davantage masculine et adulte. Dans un deuxième temps, le regroupement familial permanent rend compte de l'élargissement régulier de la pyramide d'un âge à l'autre: la population immigrée masculine vieillit (les étrangers de moins de vingt ans sont 22 % de moins en 1999 qu'en 1990, tandis que les plus de quarante ans augmentent de 15 %). L'effectif des hommes et celui des femmes tendent à s'égaliser.

Situation des immigrés

Les statistiques sur les étrangers et les immigrés sont délicates à établir: en effet, distinguer les Français en fonction de l'origine nationale de leurs parents contient un risque discriminatoire (l'utilisation du fichier des Juifs par le Régime de Vichy, pendant la Seconde Guerre mondiale, en est un dramatique exemple). C'est pourquoi ne sont recensés officiellement que les étrangers, c'est-à-dire les personnes qui résident de façon permanente en France et qui déclarent ne pas avoir la nationalité française. Les immigrés ne sont pas comptabilisés en tant que tels, dès lors qu'ils sont devenus français: ils disparaissent en tant qu'immigrés du Recensement général de la population. De même, contrairement à la plupart des États membres de l'Union européenne, la France ne possède pas de registre de population à l'échelon municipal oэ chacun, étranger ou non, doit signaler son arrivée dans la commune.

Les données statistiques sont dispersées entre différents services de l'État, et donc à différentes fins: - l'Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE) assure le recensement de la population; - l'Office des migrations internationales (OMI) recense les entrées; - la Direction de la population et des migrations dénombre les naturalisations; - l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) traite les demandes d'asile; - le ministère de l'Intérieur délivre les titres de séjour; - le ministère de la Justice est chargé des acquisitions de nationalité; - enfin, l'Institut national des études démographiques (INED) présente chaque année au Parlement son rapport sur la situation démographique. Ces données ne se recoupent ni sur la terminologie, ni sur les chiffres, ni sur l'analyse des variations. Elles peuvent donc difficilement être exploitées pour recenser les immigrés.

Le cadre politique d'intégration des immigrés

Les immigrés restent toujours attachés à leur communauté d'origine et à leur culture nationale ou "ethnique". Mais les traditions politiques des sociétés d'accueil influencent également leur participation à la vie citoyenne ou économique. Certains pays se sont construits comme terres d'immigration (États-Unis, Canada, Australie, Argentine, etc.); d'autres tendent à éluder l'apport migratoire au cours de leur histoire (les pays européens en général). C'est une des raisons pour lesquelles le modèle d'intégration d'un État-nation n'est pas transposable.

On peut distinguer trois grands modèles d'intégration des étrangers ou immigrés:

- le modèle dit ethnique, allemand, dans lequel la nationalité repose essentiellement sur la filiation ("droit du sang"), la langue, la culture, la religion; les communautés "ethniques" étrangères ne sont pas considérées comme assimilables et la politique suivie ne vise pas à les tranformer en nationaux;

- le modèle dit politique, français, dans lequel la nationalité-citoyenneté repose essentiellement sur l'adhésion au contrat social ("droit du sol") et oэ les identités dites "ethniques" sont refoulées de la sphère publique dans la sphère privée (laïcité); l'objectif implicite est l'assimilation individuelle des immigrés par l'École et par d'autres institutions;

- le modèle communautaire anglo-saxon, dans lequel les minorités sont reconnues (dans la vie sociale, mais pas juridiquement) comme des acteurs politiques; dans ce cas, le différentialisme idéologique risque d'induire des formes collectives de ségrégation spatiale, sociale, économique des immigrés.

L'acquisition de la nationalité française

Le code de la nationalité est défini par l'ordonnance de base en date du 19 octobre 1945 (modifiée en 1973, 1984, 1993, 1998). Il repose sur le jus soli (droit du sol) - on est français en raison de son lieu de naissance et de séjour (la France), même si les parents sont étrangers - et sur le jus sanguinis (droit du sang) - on est français quel que soit son lieu de naissance et de résidence, à condition que les parents soient français.

Les trois modes principaux d'acquisition de la nationalité sont:

- la naturalisation, c'est-à-dire l'octroi de la nationalité à des personnes majeures ayant vécu au moins cinq ans en France;

- l'acquisition pour les enfants d'étrangers nés et présents en France pendant cinq ans au moins entre l'âge de 11 ans et leur majorité (en fonction de l'article 44). Pour bénéficier de ce droit, la "manifestation de la volonté" a été appliquée entre 1993 (loi du 22 juillet) et 1998 (loi du 16 mars);

- la déclaration à la suite du mariage avec un ou une Française (l'union doit avoir duré au moins un an).

La nature des politiques publiques d'intégration

Selon la tradition républicaine, les politiques publiques doivent être indifférentes à la nationalité d'origine; il n'existe pas de mesure assurant une discrimination positive en faveur des immigrés étrangers ou Français. Les étrangers bénéficient des droits civils, sociaux et économiques, au même titre que les citoyens nationaux; les droits politiques (au sens du droit à voter et à être élu) sont réservés à ces derniers. Par exemple, les dispositifs et mesures de lutte contre le chômage ou d'insertion professionnelle ne visent pas les immigrés comme population spécifique, mais ils peuvent les concerner en tant que publics "défavorisés", comme les chômeurs de longue durée, les parents isolés, les handicapés ou les jeunes sans qualification.

Toutefois, le Fonds d'action sociale (FAS) pour les travailleurs immigrés et leurs familles, créé en 1958, a pour mission de favoriser l'intégration sociale des immigrés grâce à des actions en direction des familles, de l'enfance et de la jeunesse, dans les domaines du logement (participation à la gestion de foyers des travailleurs migrants), de la formation (dont l'alphabétisation) et de l'emploi.

Le bilan de la politique française d'intégration des immigrés

Généralement, les observateurs s'accordent pour considérer que le modèle français d'intégration a fait ses preuves: les anciennes vagues d'immigration (Italiens, Polonais, Belges, Espagnols, etc.) ont été assimilées; les vagues plus récentes (Portugais, Maghrébins) seraient en voie d'intégration sociale, culturelle, politique - à défaut d'insertion économique et professionnelle... En effet, si on se réfère aux critères classiques d'intégration:

- l'accès à la nationalité confirme l'efficacité du modèle: du temps de la "manifestation de la volonté", les enfants d'immigrés ont massivement demandé la nationalité française; ils l'acquièrent désormais automatiquement;

- les unions mixtes (entre Français et étrangers) sont nombreuses: selon le recensement de 1999, sur les 271 361 mariages dénombrés en 1998, 9,6 % ont été célébrés avec un conjoint étranger;

- à l'école, selon les sociologues, à conditions socio-économiques et familiales comparables, les enfants d'immigrés réussissent au moins aussi bien que les autres jeunes Français.

- dans le domaine du logement, on n'observe pas à proprement parler de ghettos, les quartiers dits "sensibles" étant formés de diverses populations en situation précaire, dont les origines sont variées. Précisons tout de même que près des deux tiers des immigrés habitent une ville de plus de 200 000 habitants (un tiers réside en Île-de-France).

Néanmoins, dans certains domaines, le modèle d'intégration à la française paraît s'essouffler, même si les causes des difficultés des immigrés sont plus socio-économiques (origines populaires, faibles qualifications professionnelles) qu'"ethniques" (origine étrangère, cultures nationales):

- en ce qui concerne l'orientation scolaire, les jeunes étrangers ont moins de chance que les autres d'accéder à une scolarité dite "normale" (collège, lycée d'enseignement général, enseignement supérieur). Par ailleurs, les familles françaises des classes moyennes mettent en oeuvre diverses stratégies pour éviter que leurs enfants fréquentent des établissements à forte proportion d'enfants d'étrangers (dérogation à la carte scolaire, inscription dans le privé). Les établissements scolaires eux-mêmes constituent des classes ou filières "d'élite" ou au contraire dévalorisées à forte homogénéité sociale et donc "ethnique".

- en ce qui concerne le logement, on observe dans certains quartiers, cités ou grands ensembles, des concentrations des franges les plus défavorisées socio-économiquement, parmi lesquelles les immigrés sont sur-représentés;

- en ce qui concerne l'emploi, en 1995, les étrangers actifs (c'est-à-dire ceux qui avaient un emploi ou en recherchaient un) étaient 1,970 million (soit 7,8 % de la population active totale). Parmi eux, 46 % étaient des ouvriers (contre seulement 26 % en moyenne). Par ailleurs, l'appartenance des immigrés aux catégories ouvrières se vérifie quel que soit le pays d'origine - et elle est particulièrement forte parmi les personnes originaires du Maroc et d'Algérie. La population immigrée doit faire face à une plus grande précarité devant l'emploi (contrats à durée déterminée, emplois intérimaires). Elle est particulièrement touchée par le chômage (en 1995, 20 % des étrangers actifs étaient au chômage, contre 12 % en moyenne). Les ressortissants extra-européens sont les plus affectés: en mars 1998, leur taux de chômage, au sens du Bureau international du travail (BIT), s'élevait à 31,4 % contre 11 % pour les Français. La situation des jeunes étrangers (15-24 ans) est encore plus difficile: leur taux de chômage est passé de 22 % à 43 % entre 1992 et 1996, tandis que celui des jeunes Français n'a augmenté que de 16,2 % à 21 % durant la même période.

Les causes de ces difficultés d'intégration ne sont pas seulement économiques ou sociales (manque de formation et de qualification, faiblesse des ressources financières, sociales, etc.); elles relèvent également des représentations culturelles réciproques.

- La discrimination envers les immigrés s'observe principalement lors de l'accès à l'emploi. Les offres d'emploi ouvertement discriminatoires sont pénalement condamnables, mais de nombreuses autres pratiques, plus discrètes, échappent à la justice. C'est pourquoi le seul recensement des condamnations judiciaires est insuffisant pour les évaluer (74 en 1995 et 81 en 1996).

- Le racisme s'exerce surtout à l'égard des populations dont la présence évoque un passé colonial lourd de conflits: les immigrés d'origine maghrébine sont les premières cibles de l'hostilité des natio-naux (avant les Africains, bien avant les Asiatiques et surtout les Portugais). L'adhésion à l'islam souvent perçu comme "inassimilable" dans la civilisation française ou tout au moins réfractaire à la laïcité, et pourtant deuxième religion en France, est considérée dans le pire des cas comme un défi à la tradition nationale d'intégration. Par ailleurs, certaines différences de moeurs (statut de la femme, modes de vie, autorité familiale, etc.) alimentent le sentiment d'étrangeté.

Dans une perspective historique, on doit noter que tous les groupes d'immigrés, quelles que furent leurs nationalités d'origine, leurs religions, leurs couleurs de peau ou leurs moeurs, ont été victimes du racisme. La xénophobie est souvent liée à une période de dépression économique et les notions de "seuil de tolérance" ou d'"inassimilabilité" sont dépourvues de sens sociologique.

Les perspectives pour l'intégration des immigrés en France

Aujourd'hui, l'immigration en France ne peut plus s'appréhender en dehors du contexte européen; d'une part, parce que les parcours d'intégration des immigrés européens et extra-européens divergent (meilleure intégration des premiers, citoyens de l'Union; apparition de la notion de "racisme européen" à l'encontre des seconds); d'autre part, parce que les politiques nationales d'immigration et d'intégration s'inscrivent désormais dans des traités communautaires qui définissent les cadres d'action des États membres. D'ailleurs, ces derniers sont désormais confrontés aux mêmes problèmes: mutation économique, crise de l'emploi, ségrégation urbaine, marginalisation des travailleurs peu qualifiés, remise en cause des systèmes éducatifs, racisme, etc.

Chaque pays se caractérise par sa façon d'intégrer sa population, produit de sa tradition politique. Mais en même temps la politique d'asile et d'immigration devient communautaire: les accords de Schengen (1985 et 1990) avaient déjà conduit, entre les pays signataires, à une harmonisation des conditions de déli-vrance des visas de courts séjours. Le traité d'Amsterdam (article 73 K), signé en 1997, prévoit que le Conseil de l'Union définit les mesures relatives à la politique d'immigration dans deux domaines: d'une part, les conditions d'entrée et de séjour (délivrance par les États membres de visas et de titres de séjour de longue durée, y compris aux fins de regroupement familial), d'autre part, l'immigration clandestine et le séjour irrégulier. À (long) terme, ces décisions se prendront par un vote à la majorité. Pour autant, les États-nations conserveront la possibilité de définir de façon autonome leurs modes originaux de se constituer en tant que communautés de citoyens.

 

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III. LE CHOMAGE

 

 

La fin du XXe siècle est marquée par la persistance d'un chômage massif dans de nombreux pays industrialisés.

Cependant, l'idée même de chômage est très récente. Le paysan du Moyen Âge qui passe l'hiver au coin du feu en attendant le retour des beaux jours n'a pas de travail, mais il n'est pas un chômeur. C'est aux alentours des années 1900-1930, à l'issue de la révolution industrielle, puis au travers des péripéties dramatiques de la crise de 1929 qu'a été précisée la définition de l'emploi, notamment celle de l'emploi salarié. Cette définition fut corrélative à l'apparition du chômage. Si ce dernier est désormais quantifiable, les méthodes de calcul sont diverses, et l'on constate aujourd'hui des polémiques permanentes sur les effectifs véritables des chômeurs.

1. Définitions et enjeux du chômage

La définition du chômage a nécessité un grand effort de codification sociale.

Le chômage pour le BIT

Il a fallu attendre 1954 pour qu'existe une définition internationale du chômage, due au Bureau international du travail (BIT): pour être reconnu comme chômeur, il faut être sans emploi (critère 1), en rechercher un (critère 2), être disponible (critère 3). Cette formulation cache des choix conventionnels mais non arbitraires. Les chômeurs appartiennent à la «population active», laquelle est composée des personnes ayant ou cherchant un emploi, cependant que les «inactifs» rassemblent toutes les autres (enfants, étudiants, ménagères, retraités, etc.). On voit ainsi qu'une personne «inactive» peut fort bien avoir d'intenses occupations laborieuses, comme une mère de famille gérant son foyer. Mais elle n'est pas rémunérée. Les critères 1 et 3 sont les plus simples, car ce sont des critères de situation, que l'on peut en principe constater objectivement. Pour la disponibilité se pose la question des maladies bénignes: si l'on conçoit qu'un malade de longue durée ne peut guère prétendre être un chômeur, que dire de celui qui souffre d'une grippe? Pour le BIT, la maladie bénigne ne retire pas la qualité de chômeur.

Chômage et absence d'emploi pour le BIT

Plus difficile est la définition de l'absence d'emploi. Le BIT est radical sur ce point: c'est par un entretien que doit se faire le décompte des chômeurs, et toute personne ayant travaillé ne serait-ce qu'une heure durant la semaine précédant cet entretien (la «semaine de référence») ne peut être considérée comme étant au chômage. En somme, le chômage est une occupation officielle à temps plein, et tondre la pelouse de son voisin, pour avoir un supplément d'argent de poche, voire pour survivre, retire la qualité de chômeur. Enfin, le critère 2 est le plus délicat, car il s'agit d'un critère de comportement et non de situation: le BIT a répertorié une série d'actes de recherche d'emploi, et il est nécessaire d'en avoir effectué au moins un durant la semaine de référence pour être considéré comme chômeur. Est donc exclue du décompte la personne qui a renoncé à chercher activement et régulièrement un emploi, le «chômeur découragé».

Le chômage «français»

Les conventions drastiques du BIT permettent de comprendre qu'il existe dans la plupart des pays plusieurs chiffres du chômage à un instant donné. En France, la définition du BIT est reprise par l'Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE) dans son enquête annuelle. On obtient ainsi une grandeur statistique, intitulée PSERE («population sans emploi à la recherche d'un emploi»), qui, après quelques modifications mineures, devient le «chômage au sens du BIT». Mais il existe aussi les décomptes de l'Agence nationale pour emploi (ANPE), organisme administratif ayant pour mission d'enregistrer les chômeurs, pour leur permettre d'être indemnisés et les aider à retrouver un emploi. Les statistiques de l'ANPE sont mensuelles et prennent en compte les «demandeurs d'emploi en fin de mois» (DEFM); les chiffres sont fournis «bruts» ou «en données corrigées des variations saisonnières». L'ANPE se borne, en réalité, à faire le décompte de ses inscrits: il n'est nullement nécessaire d'être inscrit à l'Agence pour être chômeur, et l'Agence laisse figurer sur ses listes des personnes qui ne correspondent pas à la définition internationale du chômage. Ce qui ne retire pas leur intérêt aux chiffres de l'ANPE: mensuels et connus rapidement, ils informent plus sur les tendances que le bilan annuel de l'INSEE, établi après plusieurs mois de traitement statistique.

La réalité du chômage

La réalité ne s'inscrit cependant pas tout entière à l'intérieur de ces divergences, parce que le chômage, très élevé en France depuis le début des années 1980, a entraîné la création de multiples «stages» ou «travaux» qui, sans constituer de véritables emplois, ont permis de donner provisoirement un statut, une occupation et un maigre revenu à des personnes (des jeunes principalement) qui cessent alors d'être comptées au nombre des chômeurs. C'est ainsi que d'autres estimations ont été proposées, dépassant fréquemment trois millions de personnes sans emploi. On ne doit pas conclure, à partir de ces discordances, à une incapacité des statisticiens à saisir un phénomène dont tout le monde ressent dans la vie quotidienne le caractère dramatique: le chômage compte des «franges», c'est-à-dire qu'il existe des personnes qui, sans disposer d'un véritable emploi, ne sont pas au chômage au sens strict, et ne sont pas non plus inactives; selon les conventions adoptées, elles apparaîtront dans l'une ou l'autre de ces catégories.

Les enjeux du chômage

Trois traits principaux font de l'emploi et donc de l'absence d'emploi, un enjeu majeur de notre temps. Tout d'abord, la détention d'un emploi, en particulier salarié, est devenue dans les sociétés modernes le moyen presque unique d'assurer son existence: le rentier est une figure du passé. Ensuite, dans de très nombreux pays, l'accès aux prestations sociales est lié aux cotisations payées durant les périodes d'emploi. Enfin, dernier aspect et non le moindre, l'emploi est considéré de nos jours comme la voie naturelle de l'autonomie, de la responsabilité et de l'épanouissement personnel. Dans les sociétés individualistes et au-delà du salaire, du statut et de la considération, l'emploi condense la plupart des espoirs et des désillusions, des échecs et des succès de la vie sociale.

2. Les explications du chômage

Il n'y a pas d'accord complet entre les économistes sur les explications de l'emploi et du chômage. Cette situation, qui est ancienne puisqu'elle remonte aux controverses des «classiques» au début du XIXe siècle, en particulier entre Ricardo et Malthus, s'explique notamment par l'importance des enjeux, qui sont à la fois pratiques et théoriques, une conception ou une autre de l'emploi et du chômage engageant nécessairement une vision de l'économie tout entière. Ainsi les principes de macroéconomie élaborés par Keynes dans sa Théorie générale de l'emploi, de l'intérêt et de la monnaie (1936) sont-ils indissociables des défis posés par la situation de l'emploi dans la période 1930-1940.

 

Chômage et technologie

Une première explication du chômage provient de ce que l'on peut appeler le déterminisme technologique, c'est-à-dire l'idée que la machine détruit l'emploi. Mais tout dépend du niveau de l'activité économique, de la durée moyenne du travail, et il est indispensable de renvoyer dos à dos la thèse pessimiste du chômage créé par les robots et le rêve optimiste, énoncé par Aristote, des «navettes qui fonctionneraient toutes seules». Ce qui n'exclut pas que des périodes d'intenses mutations technologiques ne soient susceptibles de créer du chômage, mais leur effet n'a rien de mécanique.

Chômage saisonnier et chômage conjoncturel

Une deuxième approche du chômage consiste à opposer directement le chômage «frictionnel» et le chômage «saisonnier» au chômage «conjoncturel», voire «structurel». Cependant, qu'il y ait toujours un certain nombre de travailleurs en transit entre deux emplois constitue la respiration même de l'économie. De plus, il est difficile de juger de son niveau quand on sait que le plein-emploi pour l'économie américaine se situe à un taux de chômage voisin de 5 %, et que la France a connu durablement des taux de l'ordre de 1 %? Le «reste» du chômage est donc soit conjoncturel, soit structurel: mais peut-on distinguer ces deux aspects lorsque le chômage s'installe dans la longue durée?

Le chômage volontaire

La théorie libérale ou néoclassique, la plus courante, voit dans le chômage le résultat d'entraves sur un marché du travail posé comme fondamentalement rééquilibrant. Si, dans cette perspective, l'emploi résulte des actes individuels d'agents opérant sur le marché du travail – les uns (les travailleurs) offrant leurs services et les autres (les entreprises) les recherchant –, la confrontation des offres et des demandes devrait, au travers des variations des salaires, éliminer toute situation de chômage. Telle est en effet la mécanique de base d'un marché: un excédent de l'offre sur la demande devrait conduire les offreurs à réviser à la baisse leurs prétentions, et donc les demandeurs à se saisir de l'aubaine. Symétriquement, les pénuries de main-d'œuvre donnent bien lieu à des «flambées» des salaires, les entreprises se disputant la main-d'œuvre; le chômage persistant s'explique alors par des pressions permanentes, plus ou moins légitimes (existence de salaires minimaux, ententes syndicales, réglementations diverses), sur les salaires et qui les empêchent de baisser. La conséquence pratique de cette analyse, tirée dès les années 1920 par le Français Jacques Rueff, est simple et provocante: il faut démanteler tout ce qui s'oppose au libre jeu du salaire, ou alors admettre que le chômage est, en tout ou partie, «volontaire».

3. La lutte contre le chômage

Tout État réglemente plus ou moins les relations professionnelles, déterminant notamment le cadre juridique de la relation de travail et, souvent, les modalités des confrontations entre patronat et syndicats. Mais l'ampleur du chômage qui se manifeste dans les pays industrialisés depuis les années 1980 a conduit les États à de nombreux développements visant à en atténuer les effets, à le contenir, voire à le résorber.

On distingue traditionnellement deux grands types d'instruments des politiques de l'emploi: les uns, «passifs», constatent le chômage et en gèrent les effets, les autres, «actifs», visent à s'attaquer directement aux causes supposées du phénomène. Dans les faits, les choses sont loin d'être aussi simples.

La gestion passive du chômage

Parmi les instruments «passifs», le plus important est l'indemnisation du chômage. Celle-ci s'est massivement développée durant les années 1970 et 1980, avant de subir un coup d'arrêt, puis d'être énergiquement contenue. Aucun pays ne secourt tous ses chômeurs (en France, environ 60 % des chômeurs bénéficient d'une indemnisation), et le niveau relatif des indemnités tend à baisser (si l'on a vu des chômeurs recevoir 90 % de leur salaire antérieur, ce chiffre appartient au passé; c'est une moyenne de 60 % qui prévaut aujourd'hui, et pour une période ne pouvant dépasser quatre années). Les autres instruments «passifs» sont la mise en préretraite, et tous les moyens, plus ou moins autoritaires, qui visent à dissuader telle ou telle catégorie de travailleurs de se présenter sur le marché du travail, par exemple la fermeture des frontières et le renvoi de travailleurs immigrés dans leur pays d'origine.

La gestion active du chômage

Parmi les instruments «actifs», on trouve les subventions à l'embauche, qui visent à abaisser le coût du travail: l'exemple typique est l'exonération, pour un an ou deux, des charges sociales résultant de l'embauche de travailleurs de telle ou telle catégorie. Mais il y a aussi l'ensemble des actions de formation et de recyclage, ainsi que les politiques d'aménagement et de réduction du temps de travail, qui visent à dynamiser l'économie et la main-d'œuvre, mais dont les résultats sont encore médiocres.

L'efficacité de la lutte contre le chômage

L'efficacité des mesures des politiques de l'emploi reste discutée. Les pays occidentaux leur consacrent des sommes assez variables – de 0,5 à 5 % de leur PIB –, et la plupart d'entre eux privilégient fortement l'indemnisation. C'est ainsi qu'en France, à la fin des années 1980, plus de 60 % des dépenses des politiques de l'emploi étaient consacrés aux dépenses «passives». À l'opposé, la Suède consacrait, dans le même temps, 60 % d'un montant comparable (de l'ordre de 3 % du PIB) à des dépenses «actives»: le taux de chômage dans ce pays à la même époque n'a guère dépassé les 3 % de la population active, alors que la France connaissait un taux de 10 %. Mais ce succès dépendait, pour une grande partie, du système de relations professionnelles, des réseaux de formation et de la concertation permanente qui préside à la gestion d'une politique de l'emploi anciennement implantée. Preuve que la circulation de la main-d'œuvre est indissociable des choix organisationnels, culturels et sociaux effectués par chaque pays. L'emploi et le chômage resteront ainsi longtemps des indicateurs privilégiés de la cohésion et de l'ouverture d'une société.

2001 Hachette Multimédia / Hachette Livre

 

4. La hausse continue du chômage, la détresse des licenciés

Le nombre de chômeurs a progressé de 17 000 en janvier pour atteindre 2 323 800. Jacques Chirac a assuré, jeudi 27 février, que le gouvernement s'attachait à "mieux répondre aux difficultés des travailleurs éprouvés par la perte de leur emploi".

 

L'augmentation du chômage et l'accumulation des plans sociaux n'entament pas le volontarisme du chef de l'Etat. "C'est maintenant que se gagnent les emplois de demain", a lancé Jacques Chirac, en inaugurant, jeudi 27 février, à Crolles (Isère), près de Grenoble, une unité pilote de recherche et de développement en nano-électronique, qui doit créer, selon lui, 1 500 emplois directs et 3 500 emplois indirects.

Alors que le chômage a augmenté de 0,7 % en janvier 2003, selon le ministère des affaires sociales, la France, a souligné le chef de l'Etat, "agit sans relâche" pour créer des emplois hautement qualifiés, avec l'ambition "d'être reconnue partout comme une terre d'accueil favorable à l'investissement, à l'innovation, au lancement d'activités nouvelles et à la création d'emplois". Le président de la République s'est félicité de l'exemplarité du pôle grenoblois, résultat d'une alliance entre le hollandais Philips, l'américain Motorola et le franco-italien STMicroelectronics, dont la production est issue de la recherche publique, privée et fondamentale.

M. Chirac n'a pas oublié pour autant l'emploi d'aujourd'hui, en assurant que "tout la gamme des moyens d'action" était mise en œuvre par le gouvernement "pour améliorer l'environnement des entreprises", en citant notamment la formation, les baisses d'impôt et de charges, l'assouplissement des 35 heures. La France, a-t-il ajouté, s'attache "à mieux répondre aux difficultés des travailleurs éprouvés par la perte de leur emploi", comme aux inquiétudes "de ceux que l'évolution de leur entreprise laisse incertains de l'avenir".

Il n'est pas sûr que ces propos rassureront les 900 salariés de l'usine Matra Automobile de Romorantin (Loir-et-Cher) ou les 218 salariés de l'usine Pechiney d'Auzat (Ariège), dont la fermeture a été annoncée, ou ceux de Giat Industries où se prépare une nouvelle vague de suppressions d'emplois. Le ralentissement de l'activité que, selon Jean-Pierre Raffarin, le gouvernement n'a "pas voulu, par ses décisions, accélérer", se traduira, dans les mois prochains, par une nouvelle détérioration du marché du travail. En 2002, sur fond de croissance réduite (+ 1,5 %), le rythme des créations d'emplois salariés a fortement reculé (+ 63 000 postes en glissement selon l'Unedic, + 0,4 % selon l'Insee). Et, depuis juin 2001, le nombre de chômeurs indemnisés a augmenté de 420 000 personnes. Jamais, selon le régime d'assurance-chômage, la progression du chômage indemnisé n'a été si rapide et si importante. Cette tendance devrait se poursuivre en 2003.

En janvier 2003, selon les dernières statitisques officielles, il y avait 2 323 800 demandeurs d'emploi dits de catégorie 1 (à la recherche d'un emploi à temps plein et à durée indéterminée), soit une augmentation de + 0,7 % (17 000 chômeurs de plus). A l'aune de l'ancien baromètre officiel, qui comptabilise les chômeurs de catégorie 1 et 6 (ceux ayant exercé une activité réduite de plus de 78 heures au cours du mois précédent leur inscription à l'ANPE), l'aggravation est plus forte encore: + 0,9 % en janvier et, au total, 2 724 000 chômeurs. Le taux de chômage est désormais de 9,1 %.

Le chômage des jeunes augmente le plus fortement (+ 2,4 % en janvier, + 7,3 % sur un an) alors que le gouvernement n'a toujours pas arrêté définitivement les contours du contrat d'insertion dans la vie sociale (Civis), censé prendre le relais des emplois-jeunes. Les adultes sont un peu moins mal lotis, mais leur chômage n'en a pas moins augmenté de + 0,8 % en janvier et de + 5,4 % sur un an). Le chômage de longue durée (702 800 personnes concernées) est, lui aussi, orienté à la hausse: 436 000 personnes ont entre un et deux ans de chômage, soit une hausse de 13,1 % sur un an.

Les inscriptions à l'ANPE ont augmenté de 1 % par rapport en décembre 2002 et les sorties sont en baisse de 4,1 %. Signe de difficultés accrues dans lesquelles se trouvent plongées de nombreuses entreprises, le chômage partiel s'envole: le nombre des journées indemnisables a fait un bond de + 77,2 % en janvier et de 25 % sur un an. Et si le ministère des affaires sociales ne recense pas encore de hausse des licenciements économiques – ils ont même baissé de 28,2 % sur an –, les prochains mois promettent, sur ce terrain, d'être sombres.

Claire Guélaud et Béatrice Gurrey (à Crolles)

LE MONDE | 20.01.03 |

 

 

IV. TERRORISME

 

1. GENERALITES

 

DÉFINITION:

Emploi systématique de la violence pour atteindre des buts politiques; ensemble des actes de violence tels les attentats individuels ou collectifs qu'une organisation politique exécute pour impressionner la population et créer un climat d'insécurité. Le terrorisme peut être une méthode de gouvernement. Le mot est employé dans la période qui suivit la chute de Robespierre pour désigner la politique de terreur des années 1794-94).

Le mot de terreur est plutôt employé pour les régimes politiques opprimant une partie de leur population (terreur révolutionnaire, terreur blanche après la révolution)

Le terrorisme consiste plutôt dans l'usage de la peur, par des minorités ou des individus, en vue de déstabiliser puis détruire un ordre existant imposé par la majorité ou par un despote.

Les actes de violence politique s'emploient en général

* contre un état ou l'ordre qu'il représente (terrorisme révolutionnaire)

* contre un occupant étranger (mouvement de libération)

Terrorisme n'est pas synonyme de guerilla même s'il y a des recoupements dans les objectifs et dans les méthodes. La guerilla est une stratégie militaire qui se rapproche des principes de la guerre régulière. Au contraire les terr

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