1. La rencontre de deux intérêts
1. La rencontre de deux inté rê ts Le but poursuivi par la Russie consistait à assainir les finances de l'Empire. La dette exté rieure russe é tait, en effet, en 1886, dispersé e entre plus de cent contrats d'emprunts diffé rents. Le service de la dette accaparait 28 % des revenus de l'Etat. L'objectif é tait donc de souscrire de nouveaux emprunts en vue de la conversion de la dette russe. L'é conomie russe, fondé e sur une production agricole d'un type quasi fé odal et sur l'exploitation de quelques ressources naturelles, ne laissait qu'une place trè s marginale à l'é pargne. La recherche de capitaux allait tout naturellement inciter la Russie à se tourner vers la France, pays à l'é pargne trè s abondante à l'é poque, et dont les rentiers cherchaient des placements sû rs. Or à la fin des anné es 1880, les occasions d'investissements de capitaux dans les rentes franç aises é taient rares et limité es. L'emprunt lancé en dé cembre 1887 reç ut plus de 100 000 souscriptions. En 1891, un million d'obligations à 500 francs furent lancé es sur le marché. A partir de 1893, le lancement d'emprunts russes reprit à une é chelle de plus en plus importante, jusqu'à atteindre un total de 5, 5 milliards de francs en 1904, dont 2, 5 milliards é mis par l'intermé diaire du Cré dit Lyonnais. Les é missions reprirent avec les besoins de financement suscité s en Russie par la guerre russo-japonaise. La derniè re grande opé ration financiè re franco-russe eut lieu en 1913, à la veille de la premiè re guerre mondiale. Auprè s des é pargnants franç ais, l'une des raisons du succè s des emprunts russes é tait leur indiscutable rentabilité, supé rieure à celle des rentes franç aises. Ainsi, le premier emprunt de dé cembre 1888, lancé au prix d'é mission de 85, 08 %, se trouvait-il coté à 95, 5 % dè s avril 1889. Les emprunts russes é taient pré senté s par Henri Germain, fondateur du Cré dit Lyonnais, trè s impliqué dans les relations financiè res franco-russes, comme des placements " sû rs, de tout repos". Quant à la Russie, elle avait ré ussi, grâ ce à l'appui de ces capitaux, à tripler sa production de fonte entre 1886 et 1896, progrè s qui aurait exigé vingt à trente ans dans les pays d'Europe occidentale. A Bakou, la banque Rothschild avait apporté à l'industrie pé troliè re d'importants progrè s en matiè re de transport, et avait ouvert la production de pé trole aux marché s de Londres et du Proche-Orient.
2. L'importance du facteur politique Plus encore que par la recherche de " placements de pè res de famille", ce qu'ont lé gitimement paru ê tre les emprunts russes, c'est par le facteur politique que s'explique, pour une trè s large part, leur succè s. Ainsi le succè s de l'emprunt de 1891 s'est-il inscrit dans le contexte de l'accueil triomphal ré servé à l'escale franç aise à Cronstadt par la population russe, et de la signature de l'alliance franco-russe, le 27 aoû t 1891. Dans la mê me logique, on remarque une coï ncidence trè s é clairante entre la signature de l'alliance militaire et la reprise, à partir de 1893, des é missions de titres sur le marché franç ais. C'est l'é poque où la France fait un accueil enthousiaste au couple impé rial, venu en visite en octobre 1896, et où la mode franç aise est caracté risé e par une certaine " russomanie". Rappelons que la France et la Russie avaient é té poussé es à s'allier face à la Triple alliance (Allemagne-Autriche-Italie), et à une diplomatie allemande devenue agressive. Les motivations des é pargnants franç ais n'é taient pas exclusivement lié es à la rentabilité incontestable des emprunts russes, mais aussi à des pré occupations patriotiques: contribuer au financement du dé veloppement de l'é conomie russe, c'é tait aussi contribuer au renforcement indispensable de notre allié face à l'Allemagne. Ainsi le Quai d'Orsay a-t-il toujours é té favorable aux é missions russes sur le marché franç ais, mê me quand l'afflux incontrô lé des emprunts russes inquié tait les ministres des finances. De maniè re gé né rale, le soutien financier apporté par la Ré publique franç aise à l'Empire russe é tait considé ré comme un moyen privilé gié de renforcer l'alliance franco-russe, é laboré e dans la perspective de la revanche. Le placement des emprunts russes é tait, dans cet esprit, lié à la sé curité des frontiè res. Ainsi l'aide financiè re franç aise visait-elle à obtenir l'exé cution des construction ferroviaires jugé es indispensables par l'é tat-major franç ais. Parmi les lignes mises en chantier à la demande de la France figurent celles qui é taient destiné es à assurer le transport des troupes stationné es à l'est et au sud-ouest de l'Empire vers la Pologne. Les emprunts russes ne relevaient donc pas des seuls inté rê ts privé s, ils é taient devenus une affaire d'Etat.
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